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BIOGRAPHIE

« Appelez-moi Serge »

L’énergie, le désir et le roman personnel

Personne n’est plus fidèle à Marka que Marka. S’il y a bien un artiste qui ne ment pas sur la marchandise, c’est lui. En 1991, quand il fait paraître son premier album solo, il fallait prendre son titre – JE VOUS DIT TOUT – au pied de la lettre. Trente-trois ans plus loin, comme un contrat passé avec lui-même, nous dire tout, c’est ce qu’il continue de faire avec un aplomb, un style et une voix qui cachent à merveille ses doutes et ses angoisses. C’est donc encore de lui qu’il nous entretient sur ce disque, «miroir dans lequel chacun peut me voir» – comme disait France Gall en évoquant, entre les lignes, le métier de chanteuse dans un business qui en définit les règles. Ces règles, Marka les connaît, mais il change de trottoir quand il les croise, persuadé depuis longtemps qu’il n’est de plus grand fou que celui qui suit le chemin tracé par un directeur artistique d’une maison de disques dont la culture musicale commence à «I Gotta Feeling» (avec tout le respect qu’on a pour ce tube des Black Eyed Peas). Marka travaille en circuit court – du producteur au consommateur, ce qui garantit une grande fraîcheur et une grande sincérité à ses chansons dont il est l’unique artisan.

Si vous avez perdu de vue Marka ou s’il ne vous a pas appelé depuis longtemps, la meilleure façon d’avoir de ses nouvelles, c’est d’écouter son disque. En découvrant ses onze nouvelles chansons (dix pour être exact, la onzième est un faux instrumental – j’y reviendrai), on comprend que l’homme commence à ranger ses vieux papiers, retrouve d’anciens souvenirs et fait le tri dans ce qui était bien et moins bien dans sa vie. Joli garçon du groupe Allez Allez, beauté des années 80, Marka a l’âge de se pencher sur son âge. Il le fait savoir dans COMME LE DIT ORELSAN où il confesse que «c’est pas tous les jours la fête», mais qu’il a envie de «garder l’envie» malgré la réalité du temps qui passe en volant «nos plus belles années». Dans HEUREUX, il avoue sa difficulté à s’arranger avec lui-même – «je fais ce que je peux» – dans un quotidien qui fait son boulot de quotidien, s’encourageant à suivre quelques conseils de base – «Quand je m’en fous, c’est plus doux». Sur ses doutes, sur ses fragilités, sur le sens qu’il faut donner à tout ça (et à tout ce qu’il a fait jusqu’ici), il est bon d’écouter LES ROSES pour être rassuré sur ses intentions – «aller de l’avant» – et sur le but à atteindre puisque «l’avenir est devant toi».

Marka se souvient qu’il a connu le succès – notamment avec sa relecture de CAROLINE de MC Solaar. Il se penche avec mélancolie sur ce tube – «j’ai des souvenirs, des flashback» – mais ne succombe pas à l’appel du vieux con, au contraire… Il fait un joli doigt d’honneur à la nostalgie et propose REINE ET ROI, la suite de CAROLINE signée du même MC Solaar, une chanson pour prouver que c’est encore et toujours aujourd’hui qu’on trouve la meilleure version de lui-même. Toujours aux aguets, toujours curieux, toujours attentif (en société, quand on croit qu’il n’écoute rien, il entend tout), Marka n’hésite pas à nous entraîner au centre des chapitres les plus intimes de son roman personnel – dans MA MERE et dans UN ANGE, à propos d’un ami perdu où il est dit – «Il n’a peur de rien sauf de la vie». Et parce qu’il aime jouer avec son public – même quand son public n’est pas là, il propose à son aimable clientèle JE SUIS UN CHIEN, faux instrumental mais vraie chanson dont les paroles sont disponibles ailleurs (à vrai dire sur XXXXXXX). Au bout du disque, on aura commencé à faire le bilan d’une vie – un peu comme on le fait autour d’une table en fin de soirée avec un ami qu’on quitte au petit matin avec cette chanson – JAMAIS SENTI AUSSI BIEN – qui dit combien l’énergie est intacte et le désir là, toujours là.

Sébastien Ministru

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Appelez-moi Serge
Voodoo Belge